Avant d’entrer dans le vif du sujet, Montréal, tu as fait ta magie habituelle le 22 janvier dernier!
Comme c’est souvent le cas à Montréal, les billets ont été achetés à la dernière minute. Ça fait que c’était à moitié plein le vendredi matin, mais mon cerveau ne le voyait qu’à moitié vide. Heureusement, comme d’habitude, le Terminal Comédie Club s’est finalement rempli et le tout s’est soldé par un standing ovation. Mon deuxième à Montréal.
Merci vraiment à tout le monde d’être venu.e.s! ❤️
Maintenant, je sais que les histoires de shows d’humour qui virent mal étaient très populaires dans les podcasts il y a dix ans. Ça, et être déçu de Jurassic World.
Mais une affaire que j’ai envie de faire avec cette infolettre, c’est de vous donner accès à des choses qui ne seront jamais révélées dans des podcasts.
Avec les grands médias qui reçoivent toujours les mêmes vedettes qu’en 2014 et les podcasts qui reçoivent souvent la même poignée de gens cools, lorsqu’on a la chance d’être invité à venir faire le pitre, on en profite pour essayer d’en sortir avec quelques abonné.e.s. Ça fait qu’on sort notre côté funnay bunnay pour des podcasts d’humour parce qu’il y a humour dans le titre. Ça serait downer en esti de raconter l’histoire qui s’en vient.
Donc voici, tout en camouflant le lieu et la date précise:
Je me suis fait crier des menaces sur mon lieu de travail
Octobre 2024, il y a moins de six mois. Je me présente au spectacle sur lequel je serai le premier après l’entracte. Comme toujours, j’aime arriver d’avance pour non seulement m'assurer de ne pas être en retard, mais aussi pour assister au show. Ça me permet de profiter de la comédie, de prendre la température de la pièce et en tant que booker moi-même, de garder un oeil sur les gens que je pourrais inviter sur mes soirées.
Cette soirée se démarque des autres parce qu’on a une loge. Un luxe pas toujours disponible! Yeah!
La loge est assez vaste pour que des gens pas sur le show puissent venir chiller. Ça fait que des +1 d’humoristes (dates, partenaires, colocs, collègues…) sont souvent les bienvenus. Il y a aussi quelqu’un qui chill souvent là parce qu’il est déjà monté sur une scène. Il fait partie des meubles.
Cet individu est un peu bizarre, mais si on devait retirer les gens saugrenus de l’industrie, il ne resterait plus grand monde. Moi y compris.
La première partie du spectacle se déroule à merveille. C’est l’heure de l’entracte avec moi et le closer qui allons faire 15 minutes de solides blagues chacun après.
Bon, là, le closer va finir par jouer un rôle de soutien là-dedans et son coloc aussi. Je vais arrêter d’écrire closer en italique parce que ça me rajoute de la job de mise en page inutile.
Une discussion banale
Si t’es dans une loge d’humoriste, tu vas toujours revivre les mêmes discussions en boucle:
T’arrives de où?
Es-tu en show après?
As-tu un projet qui s’en vient?
Ouin c’est pas facile ces temps-ci de voir où l’industrie s’en va
Y’a tu quelqu’un qui a un chargeur à iPhone?
J’étais dans le point 4 avec le closer et son coloc. Je parlais de ce que je parle souvent: 🌟la gratitude🌟
L’amertume chez les artistes, c’est du poison qu’on ne doit pas cultiver. Si on l’alimente qu’un tant soit peu, ça finit par nous gruger de l’intérieur, changeant à la longue complètement notre personnalité. On devient des bibittes amères, extrêmement désagréables à côtoyer.
Le pire, c’est que de chialer et ventiler fait du bien, mais ça ne peut pas être notre seul mode de communication. Dans le small talk de loge, les gens n’ont pas le temps de confronter des idées; on yes and toute. Ça fait que t’es validé dans ton amertume. Tu peux penser que tout le monde est chill avec tout le shade que tu envoies, mais ce n’est probablement pas le cas.
Mais là où c’est laborieux, c’est quand tu veux te débarrasser de ton amertume. Ça devient difficile une fois incrusté dans ta psyché. Ça a pris une place tellement grosse dans ta vie que tu finis comme Spider-Man qui doit se battre contre un symbiote.
Pour éviter que la négativité nous colle à la peau dans une industrie où les médias de masse meurent, où le stand-up télévisé perd en importance et où le public traverse une période d’inflation, je recommande toujours 🌟la gratitude🌟.
C’est toujours gagnant d’être fier de ce que l’on a et de ce qu’on a accompli, au lieu de cultiver notre frustration des portes fermées.
Alors que je parle exactement de ce que vous venez de lire au closer et à son coloc, une silhouette se lève derrière eux. Quelqu’un qui ne m’a même pas salué en arrivant. Le dude weird.
De loin, il s’approche tout en commençant: « Heille toé t’es pas drôle! Demande toé pas pourquoi ta carrière va nulle part! J’ai jamais compris pourquoi tu te faisais booker parce que t’es vraiment pas drôle! Pis en plus t’es laitte! […] »
Des insultes sommes toute génériques sortent de sa bouche alors qu’il s’avance d’un pas décidé. Nous sommes tous subjugués. On se demande en premier s’il n’est pas en train de faire un bit. La puissance de ce qu’il se passe est tellement forte que nous, trois humoristes, n’arrivons pas à comprendre ce qu’il se passe. Nous sommes en silence complet. Imaginez-vous ça? Des humoristes en train de fermer leur yeule! Je n’avais jamais vécu ça avant!
Mais ce n’est pas une joke, même que la situation empire. Rendu près de moi, le closer et son coloc l’empêche d’avancer alors que son ton atteint des décibels agressifs: « […] ESTI SI JE TE VOIS DANS LA RUE JE TE PÈTE MAN! JE TE CASSE LA GUEULE JE TE DIS! [d’autres insultes et menaces du genre suivent] »
Je dois avouer qu’il me manque des bouts après ces premières menaces. Je suis en entré en fight or flight, et je suis de type flight.
J’essaie de comprendre ce qu’il se passe alors que je me fais pointer du doigt par le criard. Me faire menacer de violence, c’est la première fois de ma vie que je vie ça.
En plus, je me dis que dans mon humble 40 ans de vie, je ne me suis jamais battu. C’est pas à soir que ça va commencer.
…Ou ça va se passer malgré moi? Est-ce qu’il va m’attendre dehors? Est-ce qu’il traine traine un couteau avec lui?
J’ai peur pour le moment présent, mais aussi pour le futur. Qu’est-ce qui va se passer la prochaine fois que je vais croiser cet homme dans la rue?
Aussi, étant donné la manière dont je suis programmé, j’essaie de comprendre ce que j’ai fait de mal dans la situation pour mériter cette logorrhée intimidante.
Je sais que ma neurodivergence non diagnostiquée fait en sorte que je me mets souvent la bouche dans les plats sans m’en rendre compte. Quand les choses virent mal, j’essaie de voir où j’ai fait fausse route pour m’excuser au plus vite et accepter ma part de responsabilité. Mais là, je ne comprends vraiment pas ce que j’ai fait pour me faire crier des menaces.
Et aussi, il s’est passé des affaires dans ma vie qui font que je suis sensible au criage. Même quand j’ai été le gérant du lutteur Benjamin Tull et que des gens me vociféraient des insultes, même si c’était en joke, ça m’avait pareil déstabilisé.
L’animateur finit par arriver sur les lieux et escorte immédiatement l’intimidateur hors des lieux. Les trois autres, on essaie de digérer la situation.
Je ne suis vraiment pas habitué à tout ça et en plus de devoir penser à comment je me sens, je suis contraint aussi de réfléchir à comment je devrais agir. Je suis quand même, moi aussi, dans une loge. Mon milieu de travail.
En même temps, je ne sais pas si ce belliciste m’attend à la sortie du bar.
C’est vraiment déplaisant de se faire menacer de la sorte. Je ne vous le souhaite pas. « Déplaisant » est un euphémisme. C’est définitivement plus que déplaisant. C’est inquiétant.
Ensuite, une pensée traverse mon esprit:
Je suis sensé faire des blagues moi-là
Moi, je veux juste faire des jokes dans la vie. Je suis là pour ça. Je suis déjà monté sur des scènes dans toutes sortes de conditions insolites et ce n’est pas ce soir que je vais arrêter.
Le closer et son coloc ont vraiment été de bons jacks. En plus d’avoir confirmé mon innocence, ils étaient de bonnes oreilles sur lesquelles déverser mes émotions à peine mâchées.
Je prends la décision exécutive d’attendre la fin du show avant d’en parler à ma blonde et à mes amis qui ne sont pas sur les lieux. Je veux juste tasser l’évènement de ma tête pour aller faire la comédie.
Un ami de l’animateur qui est venu chiller sur place se propose de passer avant moi. Il procède à tout péter, me laissant le terrain de jeu extrêmement chaud pour mon arrivée.
Humblement, ça s’est super bien passé! Rendu là, ça fait 7-8 ans que je fais ça. Je m’en viens un vieux routier. Même si j’ai complètement oublié de prononcer tout ce qui était nouveau dans mon number, je suis vraiment content du résultat!
La suite des choses
Le mot s’est propagé dans l’établissement et les propriétaires ont pris la situation en main. L’un d’eux m’a appelé pour s’excuser de la situation et a officiellement barré le fautif de son établissement.
J’ai parallèlement créé un groupchat pour remercier les deux gentlemen qui m’ont soutenu là-dedans. J’en ai aussi parlé à quelques personnes pour éviter qu’il fasse des frasques dans des loges, en me disant que dans un monde de commères, que le mot allait se passer.
Quelques semaines plus tard, il a décidé de commenter ceci sous une de mes interventions qui ne lui était nullement adressées:
J’ai hésité avant d’écrire ceci parce que je ne voulais réveiller la bête, mais je voulais partager des choses dont on ne parle pas souvent lorsqu’on parle de la vie d’artiste.
Je voulais aussi en parler parce que je ne veux pas que ce soit le genre de choses qu’on normalise de vivre seul.
Je ne sais pas si c’est un individu qui passera de la parole aux actes, mais là, pour mon show solo de février dernier, je dois avouer m’être dit « Je fais quoi s’il se pointe? »
Depuis que j’ai annoncé le sujet de cette entrée lors de ma dernière infolettre, j’ai appris qu’il avait menacé de mort un autre booker. Les personnes de l’industrie de l’humour peuvent m’écrire afin de savoir le nom de cette personne si l’histoire ne s’est pas rendue à vous. Il faut se protéger entre nous.
Heureusement, c’est la seule fois que je me suis fait menacé de ma vie. Idéalement, la dernière.
Dans ta télé
Du côté des bonnes nouvelles, je suis passé à Ici Radio-Canada Sports pour parler de chessboxing! C’est vraiment une discipline le fun!
En gros, ce sont des rondes d’échecs et de boxe qui s’alternent. Si tu perds soit à la boxe, soit aux échecs, tu perds tout le match. Ça fait que les dynamiques aux échecs (OMG je vais perdre!) te forcent à boxer différemment (faut que je gagne par KO sinon je vais me faire mettre échec et mat à la prochaine ronde!)
Si ça t’intéresse de voir à quoi un match peut ressembler, ce combat entre Andrea Botez et Dina Belenkaya est divertissant!
Je passe rarement à la télé, mais quand je le fais, c’est complètement dégueulasse de sueurs.
Des honneurs
Ces temps-ci, je renoue avec l’écriture avec cette infolettre, mais aussi un blogue sur Chess.com. Mon article 3 life lessons I’ve learned while losing at chess m’a valu des places sur le podium des Blogger Awards! J’ai reçu les honneurs dans les catégories « Meilleurs Titres » et « Meilleur Humour! »
Ce n’est pas tout, mon article Your Elo Is Lying To You a été nommé Post Of The Month par des instances de Chess.com! Ça vient avec une tonne de prix le fun! C’est le fun de voir son talent être reconnu!
Donc, voilà!
On se revoit probablement le mois prochain. Je ferais bien une promo pour ma soirée à La Prairie, mais j’en ai pas besoin, ça fait trois saisons qu’on est toujours sold out!
Et à date, il y a eu exactement zéro menace de proférer dans cette soirée. Yé!
Merci d’être là gang!
Pierre-Luc
❤️